A chaque fois, l’histoire est la même… ou presque. Et Bodie, ville fantôme de Californie, ne déroge pas à la règle. Une progression éclair sur le dos d’un gisement. Il y a de l’or, du charbon ou autre… Et puis un jour, il n’y en a plus. La conquête de l’ouest américain a vu la création de villes champignons qui ont été désertées aussi vite qu’elles sont apparues. Les « ghost towns » sont légion et particulièrement dans les états du Southwest. Deux sites les recensent, état par état, en retraçant leur histoire si singulière : ghosttowns.com et legendsofamerica.com. Un bon moyen pour en cocher une ou deux sur votre parcours. Et ici une carte qui les recense toutes.
Sur la route des grands circuits de l’Ouest
A l’été 2011, nous avions choisi de visiter l’une des plus célèbres, Bodie, car elle se trouve sur la route (ou presque) des grands circuits de l’Ouest, entre le Yosemite, le lac Tahoe et la Vallée de la Mort. Après quelques jours dans le sublime parc du Yosemite, nous avons mis le cap à l’est. Environ deux heures de route, via le spectaculaire Tioga Pass, et voilà le Mono Lake. Il y a deux manières d’arriver à Bodie : la route 270, qui quitte la 395 ou au nord du Mono Lake, la Cottonwood Canyon Rd. On vous prévient, cette dernière est moins longue mais vous prendra plus de temps. C’est une piste à la qualité assez médiocre. Mais au moins, elle vous met directement dans l’ambiance. Que vous arriviez d’un côté ou de l’autre, au bout de la route, il y a Bodie, la ville-fantôme. L’une des plus grandes et l’une des mieux préservées du pays.
Déjà, l’endroit surprend. Ces quelques habitations nichées dans une petite vallée en plein désert – un désert bouillant cet été mais complètement givré en hiver (nous sommes à 2500 m d’altitude) – , on se demande bien pourquoi. Mais il y avait de l’or ici. Un certain W.S. Bodey en a trouvé en 1859 et les prospecteurs ont afflué.
En 1880, Bodie était même la deuxième ville de Californie avec 10000 habitants et 2000 maisons. Deux banques, des journaux, une prison, 30 mines, une voie de chemin de fer et 65 saloons sur la rue principale longue de deux kilomètres. Au total, 90 à 100 millions de dollars d’or furent extraits de ces mines. Et logiquement, la ville sentait la poudre : hold-ups, bastons, assassinats… le far-west, quoi. En 1881, le révérend F.M. Warrington en parlait ainsi : « Une mer de péché, battue par les tempêtes de la luxure et de la passion« .
Et après ? Moins d’or et surtout des incendies (1892, 1898), dont un gigantesque dans le centre-ville en 1932 : un garçon de 2 ans et demi qui jouait avec des allumettes et voilà 95 % des bâtiments partis en fumée. J’vous dis même pas la branlée qu’il a dû prendre. Bon, ces feux, la dépression et la prohibition ont eu raison de la cité. En 1962, Bodie, encore habitée pendant une bonne partie du 20e siècle malgré la fermeture des mines, est devenue Natural Historic Landmark puis State Historic Park.
Un état de délabrement arrêté
Aujourd’hui, environ 5 à 10 % des bâtiments d’époque sont encore debout et baignent dans leur jus puisque l’intérieur des maisons a été laissé en l’état. Un état de délabrement arrêté selon l’expression consacrée. Des rangers habitent sur place à l’année pour entretenir le site. C’est à eux que nous donnons notre droit d’entrée (8 dollars/personne) avant de sortir dans la fournaise (plus de 35 degrés) pour explorer. La visite se fait rapidement car la plupart des bâtisses sont fermées au public.
Déambuler dans ces restes de far-west, des maisons en ruines, des carcasses de voitures ou de calèches, est une expérience très sympa et un régal pour les photographes. On s’amuse à deviner l’utilité de chaque bicoque : saloons, commerces, croque-mort, mairie, station-service ? Et tout en haut, la mine qui domine le site. Ne ratez pas les histoires des nombreux fantômes de Bodie : une bonne chinoise qui s’assoit sur la poitrine des gens pendant qu’ils dorment dans la maison Cain, une vieille femme assise dans un rocking-chair dans la Gregory House (véridique), l’odeur de cuisine italienne chez les Mendocini, une stèle d’un jeune enfant dans le cimetière…. Voir ce fascicule et cette carte.
Dans une des rues, le musée, immanquable, regorge d’objets d’époque et de quelques goodies à vendre. Chose très agréable : aucun piège à touristes, style saloon reconstitué, boutiques à foison ou restaurants. Mais les photos parlent mieux que nous.
- Adresse
- Route 270, Bridgeport, Californie
- GPS
- Lattitude : 38.208773, Longitude : -119.014249
- Téléphone
- + 1 (760) 647-6445
- Site internet
- http://www.parks.ca.gov/?page_id=509
- Horaires d'ouverture
- 7j/7. De 9h à 18h l'été
- Tarifs
- 8$ par personne, 5$ par enfant (de 4 à 17 ans)
- Essence
- Non. Faire le plein à Lee Vining ou Bridgeport
- Temps de visite
- Au moins deux à trois heures
Météo
Bodie est ouverte toute l'année mais la route est généralement fermée l'hiver en raison des tempêtes de neige (la ville est à 2500m d'altitude). Il est possible d'accéder au parc en skis, en raquettes ou en motoneige. Donc de la neige en hiver et en été, il peut y faire très chaud. De l'eau est disponible sur place mais il vaut mieux avoir prévu le coup.